Les produits de biocontrôle en protection intégrée des cultures

La réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires conventionnels entraîne de nombreux challenges. Parmi eux, l’amélioration du niveau d’efficacité, souvent limitée, des solutions alternatives. Afin d’atteindre une protection suffisante des cultures, tout en respectant l’environnement et la santé humaine, il s’avère donc nécessaire de réfléchir de façon plus globale en combinant ces différentes solutions de lutte. De plus en plus d’études s’intéressent ainsi à l’association des produits de biocontrôle avec d’autres solutions de lutte, et notamment leur association avec les résistances variétales.

La majorité des produits alternatifs de lutte contre les bioagresseurs apporte généralement une efficacité de protection bien inférieure aux produits conventionnels. Cette efficacité est souvent de l’ordre de 50%, ce qui signifie que les symptômes sont réduits de moitié par rapport à des plantes non traitées. Cette efficacité est parfois même inférieure à 50%. Elle est par ailleurs souvent instable sur le terrain, pouvant s’avérer nulle sur certains sites ou certaines années.

De nombreux scientifiques cherchent donc aujourd’hui à identifier des conditions d’utilisation de ces produits favorisant à la fois leur efficacité et la stabilité de celle-ci. Parmi les nouvelles pistes explorées, l’interaction entre la génétique de la plante et l’application de produits de biocontrôle semble prometteuse.

Deux projets collaboratifs récents sur les stimulateurs des défenses des plantes (SDP) ont en effet montré un effet de la génétique de la plante sur l’efficacité des produits. Il s’agit du projet ONEMA DEFILeg, porté par le CTIFL, sur le mildiou de la laitue et l’oïdium du melon, et du projet DEFISTIM, porté par Syngenta, sur des maladies de la vigne, du pommier et de la pomme de terre. Un projet de thèse sur botrytis de la tomate, porté par Vegenov, a quant à lui permis de mettre en évidence une synergie entre résistance variétale et application de SDP. Plus les variétés étaient résistantes et plus les produits étaient efficaces.

 

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Niveau d’efficacité de produits de biocontrôle stimulant les défenses des plantes sur botrytis de la tomate en fonction du niveau de résistance des variétés. Les variétés sont présentées de la plus résistante (Petula) à la plus sensible (Africaine). Les produits sont codés M, E2, Cbis et A. Résultats issus des travaux de thèse de Maymoune Aljabal, réalisés à Vegenov.

 

Parmi les explications possibles de cette interaction, il est souvent mentionné la capacité de la plante à reconnaître la ou les molécules élicitrice(s). Le potentiel de résistance de la plante peut également jouer un rôle important sur le niveau de résistance induit par le SDP. Il est en effet facile d’imaginer que « stimuler des mécanismes plus performants » entrainera une plus grande efficacité du produit. Par ailleurs, beaucoup de produits de biocontrôle perdant de leur efficacité sous forte pression du bioagresseur, on peut facilement concevoir qu’en réduisant celle-ci grâce à la résistance de la variété, les produits pourront apporter une meilleure protection.

Afin de favoriser la protection intégrée des cultures, très présente dans la Directive 2009/128/CE, de nombreux appels à projets incitent à travailler sur l’association de différentes solutions alternatives.

On pourra ainsi citer l’appel à propositions de recherche ONEMA PSPE2 « Pour et sur le plan Ecophyto » dont le dépôt des projets définitifs a eu lieu le 18 mai. Une dizaine de projets devraient être retenus et démarreront début 2015.

Les projets Ecophyto DEPHY EXPES et le réseau des fermes Ecophyto DEPHY ont également pour objectif d’étudier l’association de différentes solutions alternatives de lutte en vue d’atteindre une protection suffisante des cultures.

De nombreuses initiatives européennes vont dans le même sens. Certaines thématiques des appels à projets KBBE s’y intéressent.

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En parallèle, des réseaux et groupes de travail ont été créés. Parmi les réseaux travaillant sur cette thématique, nous pouvons notamment citer le réseauPURE.

Il existe également un groupe de travail européen récent sur les Brassica, composés d’une quinzaine d’experts, se focalisant sur ce sujet (« Focus group », dans le cadre du PEI, Programme Européen pour l’Innovation).

Complétant ces différentes initiatives, un portail internet a été créé : EcophytoPic. Son rôle est de centraliser toutes les informations relatives à la protection intégrée des cultures, il comprend six plateformes filières (arboriculture, culture légumière, grandes cultures, horticulture, viticulture et cultures spécialisées).

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On peut espérer dans le futur que l’association des produits de biocontrôle avec d’autres solutions alternatives de protection des plantes (résistance variétale, rotation des cultures, gestion des apports nutritifs,…) pourra permettre de répondre aux problématiques sanitaires des cultures tout en limitant le recours aux produits phytosanitaires conventionnels.

L’Académie du biocontrôle, créée en 2013, pourra alors jouer pleinement son rôle en formant les différents acteurs du domaine agricole à la maîtrise de l’utilisation des produits de biocontrôle, et plus largement des solutions de biocontrôle, restant la condition « sine qua non » de la réussite du plan Ecophyto.

 

Crédit Photo : Salatfelder mit Kopfsalat und Lollo Rosso – © msl33 – Fotolia.com
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Ce billet a été rédigé par Hallier
Sonia a quitté Vegenov. Pour toute question relative à ce billet, Marie Turner, nouvelle responsable de l’équipe de pathologie végétale, se fera un plaisir de vous répondre.