Mesurer la qualité sensorielle

« Le goût est subjectif !», affirmation à nuancer. Certes les préférences vis-à-vis d’un produit sont subjectives : certains d’entre nous aiment par exemple les tomates à la fois sucrées et acides, alors que d’autres rejettent l’acidité. Cependant, au-delà des préférences de chacun, l’analyse sensorielle permet de mesurer, de façon objective, les niveaux d’intensité pour chaque caractéristique d’un produit (sucré, acide, amer…). Il est alors possible d’identifier parmi un lot de tomates, par exemple celle qui est la moins acide. Focus sur ce qu’est l’analyse sensorielle en production végétale.

L’Homme comme instrument de mesure

L’analyse sensorielle est définie par l’AFNOR comme : « science relative à l’examen des propriétés organoleptiques d’un produit par les organes des sens*». Certains critères importants en termes de choix pour les consommateurs sont difficiles à mesurer par d’autres techniques instrumentales. L’évaluation sensorielle permet d’analyser et interpréter les perceptions humaines générées avant, pendant et après l’ingestion d’un produit (visuelle, gustative, olfactive, tactile et auditive).

La réponse des dégustateurs à des stimuli peut varier (environnement de travail, état psychologique et physiologique des dégustateurs,…). L’analyste sensoriel, comme tout expérimentateur, doit par conséquent identifier ces facteurs et mener ses essais afin de les contrôler et les prendre en compte dans l’analyse des résultats. Il a à sa disposition des normes méthodologiques admises et suivies par tous.

Maîtriser le produit, l’environnement et l’outil de mesure

La qualité des résultats dépendra du choix et de la préparation des produits. La connaissance du produit est essentielle : variété, condition de culture, maturité, condition de conservation et condition de préparation. Elle permettra de connaître la représentativité des échantillons soumis à l’analyse et conditionnera le dispositif expérimental. Et bien évidemment, il faut veiller à ne pas introduire de biais lors de la préparation des échantillons (on ne peut pas comparer deux produits dont on ne maîtrise pas la cuisson).

La salle de dégustation se doit d’être neutre. Objectifs : présenter les produits à tous les dégustateurs dans des conditions identiques et leur permettre de se concentrer sur ce qu’on leur demande. C’est à l’analyste sensoriel de mettre les dégustateurs dans de bonnes dispositions de travail et d’entretenir leur motivation.

De ce groupe de dégustateurs baptisé le jury, dépendent les résultats. Leur motivation et leur disponibilité sont essentielles. On pourra les choisir et les entraîner selon les tâches pour les lesquelles ils seront sollicitées.

Identifier des différences entre produits, les expliquer

Le choix des méthodes d’analyse sensorielle est conditionné par l’objectif. Il y a celles permettant de déterminer si la différence entre deux produits est perceptible. Par exemple, si je remplace une variété d’oignon bien acceptée par les consommateurs par une autre, est ce que je prends un risque ?

Il y a également les épreuves qui visent à comparer des produits sur des critères définis (par exemple un critère recherché ou un défaut). On peut ainsi comparer plusieurs échantillons pour identifier ceux dont le défaut ou la qualité est la plus intense.

Il y a enfin les épreuves descriptives qui visent à mettre en évidence les ressemblances et différences entre produits : par exemple si une variété se distingue visuellement des autres variétés, on peut regarder ce qu’elle a en commun avec d’autres variétés et ce qui la différencie. Les dégustateurs participant à ces essais doivent être entraînés à identifier, décrire et quantifier l’intensité d’un certain nombre de caractéristiques.

 

Les épreuves descriptives : les deux produits sont proches sur l’intensité du goût amer et l’odeur piquante. Le chou-fleur 2 se distingue par un goût plus sucré et un arôme de noisette plus intense (données Vegenov).

Et les préférences ou évaluation hédonique

On distingue l’analyse sensorielle, qui est analytique, des épreuves hédoniques. Les techniques qui visent à mesurer les préférences des consommateurs reposent sur les techniques de sondage. Les dégustateurs sont des consommateurs, dont on va interroger un échantillon représentatif de la cible de consommateurs. On ne va pas les former donc il est essentiel de ne les interroger que sur les préférences et de ne pas poser de questions analytiques (qui pourraient biaiser leur réponse hédonique). L’utilisation parallèle de l’analyse sensorielle et des jurys entraînés permet d’expliquer pourquoi un produit est préféré par une catégorie de consommateurs plutôt qu’un autre.

Bibliographie :

*NF EN ISO 5492:Juillet 2009. Analyse sensorielle – Vocabulaire. AFNOR 2009. 107pages

En complément de ce billet : « Des fruits et légumes ? » « Avec plaisir ! »

 

Crédits Photos :
Body parts pattern : © nikolae – Fotolia.com
Salle d’analyse sensorielle (photo 1 et 3) : © Expression
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Ce billet a été rédigé par Céline Baty-Julien
Responsable Qualité sensorielle et nutritionnelle Depuis 17 ans, Céline travaille sur le goût des légumes et leur intérêt nutritionnel – de la graine à l’assiette… Son leitmotiv : faire manger des légumes (« c’est bon au goût et pour la santé »).