Quand le pathogène paraît…

Qui n’a pas entendu parler de Xyllela fastidiosa après sa fracassante apparition en France, à Rungis, au mois d’avril ? Comment ne pas s’inquiéter face à cette bactérie arrivée en Europe en 2013 et qui décime déjà les oliviers centenaires – et les autres – du sud de l’Italie ? Et pourtant, celle-ci était déjà connue et n’avait qu’un impact limité en Europe, jusqu’à ce qu’elle s’attaque aux oliviers.

La virulence de ce pathogène a conduit la France, puis l’Union Européenne à prendre rapidement des mesures pour éradiquer la maladie là où elle est présente. Le contrôle strict des importations de matériel végétal en provenance des zones contaminées, notamment l’Amérique, est également imposé. Mais l’émergence de maladies est un phénomène constant chez les végétaux et souvent moins spectaculaire. Face à ce problème des outils existent.

Un contexte international particulièrement favorable aux émergences de pathogènes

Agrobacterium rhizogenes, pathogène responsable de la maladie du chevelu racinaire de la tomate, apparu vers 2007 en France.

Agrobacterium rhizogenes, pathogène responsable de la maladie du chevelu racinaire de la tomate, apparu vers 2007 en France.

 L’émergence d’une maladie peut se manifester par l’apparition d’un nouvel agent pathogène qui se propage rapidement, mais aussi par l’augmentation de l’incidence d’un pathogène déjà connu et présent sur le territoire, ou dont la gamme d’hôtes s’étend.

Le contexte actuel est particulièrement favorable à l’émergence de nouvelles maladies. Les performances des outils de détection, notamment moléculaires, et des connaissances scientifiques peuvent en expliquer une partie. Mais l’intensification des échanges commerciaux ou tout simplement la circulation humaine est souvent à l’origine d’introductions involontaires de pathogènes. Les modifications climatiques et les changements dans les pratiques culturales jouent également un rôle important dans la prolifération et l’importance de l’attaque.

La biologie de l’hôte et de l’agent pathogène peuvent favoriser l’apparition très rapide de nouvelles maladies. On estime, par exemple, que chez les plantes maraîchères, un nouveau virus apparaît chaque année depuis 15 ans !

L’information et la veille au centre de la lutte

On comprend aisément que pour mieux se prémunir d’attaques importantes, et avant que les dégâts ne soient économiquement et socialement trop lourds, plusieurs stratégies de lutte sont à combiner (cf billet de blog « Pathogènes de quarantaine, quels moyens de lutte ? »).

Ces stratégies s’appuient sur des outils de détection performants à développer. Et c’est parfois difficile ! Ces outils constituent un préalable à l’étude des épidémies : les facteurs favorables, les sources d’inoculum, les vecteurs de la maladie.

La connaissance de ces paramètres biologiques permet ensuite d’envisager des stratégies de lutte adaptées à chaque cas particulier et prenant en compte les modes de culture, les outils de lutte curative et les résistances génétiques, qui doivent être durables.

En France, plusieurs outils de veille, de collecte et d’échange d’informations se sont développés et le web joue un rôle majeur dans ce dispositif.

Des outils nomades ont notamment été mis au point par une équipe INRA et les contenus s’enrichissent régulièrement, recensant diverses informations sur les pathogènes, depuis les photos de symptômes jusqu’aux gammes d’hôtes. Ces outils, présentés sous le portail e-phytia, apportent une aide au diagnostic, avec les applications Di@gnoplant, mais aussi de l’information sur les moyens de lutte alternative. Une autre application, en cours de développement, permettra à des contributeurs inscrits sur le site de participer à un réseau de biovigilance à partir d’observations de terrain, d’informations de localisation etc.

 

Bactéries, champignons, virus, parasites et plantes invasives… autant de sources de problèmes phytosanitaires émergents à surveiller.

Bactéries, champignons, virus, parasites et plantes invasives… autant de sources de problèmes phytosanitaires émergents à surveiller.

 

Au niveau européen, l’OEPP, dont le rôle est d’assurer une coopération internationale en protection des plantes, met à disposition des bases de données en anglais sur les pathogènes, ravageurs et plantes invasives recensés à partir des signalements des organisations nationales de protection des plantes et des informations scientifiques internationales. La liste d’alerte, notamment, apporte une information précoce sur l’apparition d’un pathogène et peut donner lieu à une étude plus poussée d’Analyse du Risque Phytosanitaire.

Pour aller plus loin, de nombreux exemples ont illustré les présentations des orateurs lors des journées de séminaire sur « les maladies émergentes chez les plantes potagères » des 8 et 9 avril 2015, disponibles pour les adhérents sur le site de l’Association des Sélectionneurs Français.

Crédits Photos : bacteria sign : © Prawny ; Autres photos : © Vegenov
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Ce billet a été rédigé par Manuelle Bodin
C’est avec plus de 15 ans d’expérience dans le développement d’outils de biologie cellulaire pour les sélectionneurs que Manuelle, grâce à son équipe, met en place des solutions techniques adaptées à chaque espèce végétale.