La consommation des légumes stagne, et maintenant…

55 % des enfants de 6 à 17 ans consomment moins de 3,5 fruits et légumes par jour, d’après l’étude ESTEBAN. Cette sous-consommation par rapport aux repères nutritionnels concernent plus les légumes que les fruits : 74% d’entre eux consomment moins de 2 portions de légumes par jour ! Chez les adultes, ils sont encore 49%. Globalement, la consommation des fruits et légumes, c’est bon pour la santé. Mais il ne suffit pas de le savoir pour atteindre les « 5 fruits et légumes par jour ». Parmi les principales raisons, on évoque le plus souvent le goût, le manque de praticité et le prix trop élevé. Et si on se penchait sur ces quelques freins à la consommation…

 

Le goût et l’habitude : ça s’acquiert plus facilement tôt

Au plus jeune âge, l’enfant a une attirance pour le goût sucré. L’amertume et l’acidité le surprennent. C’est pour ça qu’il peut faire la grimace. Il doit apprendre, se familiariser avec ces nouveaux goûts pendant la période de diversification de l’alimentation. De nombreuses études montrent que la persévérance paie : il faut parfois plus de 10 propositions d’un même produit avant de le voir accepter. Un légume non apprécié, puis apprécié après cette période d’exposition, le reste pour 79% des enfants à leurs 15 mois, 73% à leurs 3 ans et 57% à leurs 6 ans (Maier-Nöth et al., 2016). Et ça marche aussi chez les plus grands.

Au cours de la période de diversification, la variété des aliments (et par conséquent des légumes) éveille le goût et sa curiosité. Un enfant qui a eu une alimentation peu variée sera plus enclin à la néophobie plus tard (la peur de goûter des choses qu’il ne connait pas). A cette étape, et même après, les parents, et plus largement l’entourage, servent de modèle : l’enfant peut sentir l’appréhension lorsqu’on lui fait goûter de nouvelles choses, il peut aussi reproduire ce que font les autres.

L’environnement dans lequel se déroule le repas est important : en cantine, la consommation de fruits et légumes diminue lorsque le niveau sonore augmente (Graziose et al., 2019). L’implication des enfants au repas, le fait de le mobiliser lors de l’achat, favorise la curiosité. Des enfants ayant participé aux courses choisissaient plus souvent les aliments contenants les légumes inhabituels que ceux qui n’y participaient pas (Allirot et al., 2018). Chez les 10-12 ans, des programmes de jardinage à l’école ont eu un effet positif sur les préférences vis-à-vis des légumes et sur leur consommation (Leuven et al., 2018). Et chez les adultes, les cours de cuisine, le partage, ça marche aussi !

Une bonne habitude prise tôt est plus facile à tenir dans le temps. Retrouvons le plaisir d’en manger (cf billet Vegenov « Des fruits et légumes ? Avec plaisir ! »).

 

La praticité : des solutions existent

La consommation des légumes est souvent associée à un moment où on prend du temps : du temps pour choisir, pour préparer, cuisiner et pour déguster et partager. Elle peut également être associée à la notion de naturalité et d’authenticité. Ce moment est également une façon de se réapproprier son alimentation. Une façon encore de se faire plaisir.

Et pour les moments où on n’a pas le temps, de plus en plus de solutions pour aller plus vite se développent.

Dans l’univers du frais, on voit des solutions « Fresh’découpe » prêtes à consommer ou cuisiner et dans des formats plus individuels. Dans les rayons surgelés, certains légumes sont proposés déjà cuits, prêt à réchauffer.

On voit également certains consommateurs pratiquer le batch cooking : on consacre un peu de temps le week-end pour préparer les plats de la semaine, prêts à être assemblés.

Enfin, certains légumes sont plus faciles à préparer et consommer comme la tomate, le concombre, les radis, les carottes. D’autres sont moins fragiles et on peut les conserver plus longtemps après l’achat : l’artichaut par exemple se bonifie lorsque qu’il a été conservé quelque jour (et il est même plus digeste). Délivrer des conseils, des astuces, des suggestions pour faire bien et bon peut également susciter la consommation des légumes.

Ensuite, à chacun de faire le choix qui lui convient le mieux, en terme de compromis temps-implication-goût-coût en fonction des occasions.

 

Parlons du prix

C’est un argument souvent avancé pour expliquer la faible consommation des légumes.

Certes, contrairement à la plupart des produits transformés, les prix des fruits et légumes frais peuvent fluctuer rapidement. Cela donne la possibilité d’en acheter lorsque les prix sont moins élevés en pleine saison.

C’est également parce que les produits frais sont fragiles et nécessitent de la main d’œuvre et du savoir-faire pour arriver dans les étals.

Et puis la cherté perçue est-elle réelle ? Plusieurs choses interviennent dont 2 : à quoi compare-t-on le prix des fruits et légumes ? Et dans quelques unités ? Par exemple, 1 baguette à 1 euro, ça fait 4 euros le kg : nombre de légumes sont à moins de 4 euros le kg. Dans l’absolu, le mieux serait peut-être de raisonner par portion pour communiquer les prix au consommateur : 1 kg de carottes à 1,5 euros le kg ça fait, une fois épluché, une portion de carotte crue à 0.19 euro ! C’est environ le même prix qu’un yaourt aux fruits.

Frais de saison ou transformés, il est possible de consommer 5 portions des fruits et légumes par jour à prix raisonnable, et d’y prendre goût.

 


Références :

Etude ESTEBAN : Équipe de surveillance et d’épidémiologie nutritionnelle (Esen). Étude de santé sur l’environnement, la biosurveillance, l’activité physique et la nutrition (Esteban), 2014-2016. Volet Nutrition. Chapitre Consommations alimentaires. Saint-Maurice : Santé publique France, 2017. 193 p.
http://invs.santepubliquefrance.fr/Publications-et-outils/Rapports-et-syntheses/Environnement-et-sante/2018/Etude-de-sante-sur-l-environnement-la-biosurveillance-l-activite-physique-et-la-nutrition-Esteban-2014-2016-Chapitre-Consommations-alimentaires

Maier-Nöth, A. ; Schaal, B. ; Leathwood, P. ; Issanchou, S. (2016). The Lasting Influences of Early Food-Related Variety Experience: A Longitudinal Study of Vegetable Acceptance from 5 Months to 6 Years in Two Populations. Plos One

Graziose, M.M. ; Koch, P.A. ; Wof, R. ; Gray, H.L. ; Trent, R. ; Contento, I.R. (2019). Cafeteria noise exposure and fruit and vegetable consumption at school lunch: A cross-sectional study of elementary students. Appetite 136: 130-13

Allirot, X. ; Maiz, E. ; Urdaneta, E. (2018). Shopping for food with children: A strategy for directing their choices toward novel foods containing vegetables. Appetite 120: 287-296

Leuven, J.R.F.W. ; Rutenfrans, A.H.M. ; Dolfing, A.G. ; Leuven, R.S.E.W. (2018). School gardening increases knowledge of primary school children on edible plants and preference for vegetables. 6:1960–196


 

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Ce billet a été rédigé par Céline Baty-Julien
Responsable Qualité sensorielle et nutritionnelle Depuis 17 ans, Céline travaille sur le goût des légumes et leur intérêt nutritionnel – de la graine à l’assiette… Son leitmotiv : faire manger des légumes (« c’est bon au goût et pour la santé »).