Le crowdfunding, un financement qui s’organise.
Le montant des fonds levés en France grâce au crowdfunding a presque triplé entre 2012 et 2013. Une soixantaine de plateformes de financement participatif se propose d’accompagner votre projet, indifféremment de la thématique ou du stade de vie de celui-ci.
Le crowdfunding (« financement de foule »), ou financement participatif, consiste à collecter des fonds auprès d’une communauté de donateurs ou d’investisseurs individuels via une plateforme d’intermédiation Internet. Ce mode de financement est essentiellement mobilisé dès lors que tous les autres moyens de soutien financier font défaut. Et, à l’instar de tout dossier de financement, il nécessite une préparation rigoureuse pour atteindre son objectif.
Né au XVIIIème siècle, le concept de crowdfunding s’inscrit dans la lignée du mécénat artistique ou caritatif (e.g. construction du piédestal de la statue de la Liberté à New York en 1886 ; appels à souscriptions privées de Mozart ou Mark Twain pour finaliser leurs œuvres…). Le phénomène a connu un nouvel essor dans les années 90 avec l’avènement d’Internet et notamment du Web 2.0, permettant les relations de particulier à particulier (peer-to-peer ou P2P) et donc de contourner les intermédiaires financiers traditionnels.
Un concept simple et protéiforme
Le crowdfunding repose sur une méthode de financement de tout ou partie d’un projet (y compris la création d’entreprise) qui, via une plateforme, rapproche le porteur du projet d’une large communauté d’investisseurs potentiels. On distingue plusieurs typologies de crowdfunding selon la nature même du financement (plateformes françaises citées en exemple) :
- Le don (reward-based crowdfunding) avec ou sans contrepartie de type goodies, citation, invitation, etc. (Ulule, Kisskissbankbank , Zentreprendre, Reservoirfunds).
- Le prêt (peer-to-peer ; crowdlending) entre particuliers, dont la durée et les intérêts sont variables (Prêt d’Union, Hello merci, Babyloan, Unilend). Ces plateformes exercent généralement avec l’accord d’une banque partenaire pour assurer la régularité des opérations.
- L’investissement en capital (equity-based crowdfunding) ou participation aux fonds propres de la société créée dont la rétribution est réalisée via les dividendes et la plus-value potentielle (Smartangels, Anaxago, Happy Capital, Investir99, SparkUp, Wiseed, Sowefund, Particeep, Kiosktoinvest, MyMicroInvest. L’outil est complémentaire des autres dispositifs de financement en phase d’amorçage, et présente même des similitudes avec la démarche d’investissement des Business Angelspour le financement de PME.
A ces catégories s’ajoutent la notion de production communautaire, un modèle où les investisseurs sont également coproducteurs (My Major Company…). Le financement peut être total ou partiel, prendre la forme d’une augmentation de capital (financement 2.0 ou levée de fonds 2.0), être largement ouvert ou réduit à un cercle de réseaux, de contacts.
Par ailleurs, certaines plateformes sont spécialisées dans le microcrédit solidaire (Babyloan, Kiva…), le financement des entreprises (Anaxago, Wiseed, Reservoirfunds, Unilend…), ou mixent les trois modèles (Fondatio, Mynewstartup, U’start me).
Stratégie et capital social du créateur, clefs du succès
La conduite d’une campagne de crowdfunding doit être méthodologique. Elle commence par le choix d’une plateforme ayant une certaine e-réputation sur la nature du projet et offrant le type de financement adapté au projet.
Le porteur de projet s’inscrit sur la plateforme pour y présenter, le plus souvent succinctement, son projet.
Pour fonctionner la plateforme prend une commission sur le montant des sommes récoltées (de 3 à 12 %, s’ajoutant parfois des frais de transactions).
Le porteur de projet sollicite la communauté d’internautes autour de son projet selon des critères définis : temps de collecte (1 à 3 mois), montant du projet (200 euros à 2,5 millions d’euros), montants des investissements, durée (1 mois à 5 ans) et taux d’intérêt des prêts, etc. Pour cela, il convient d’établir un plan de communication rigoureux avec la définition d’objectifs, la réflexion sur les retours proposés aux contributeurs et la rédaction d’un message suscitant confiance, curiosité, émotion et intérêt. La communauté des investisseurs se définit comme suit, les deux premiers cercles contribuant au fond appelé « love money » :
- 1er cercle, composé des proches du porteur du projet (famille, amis) et constituant près de 50% des souscripteurs;
- 2ème cercle, connexe au premier, réunissant les connaissances des proches ;
- 3ème cercle, le plus difficile à atteindre, rassemble les personnes sans lien avec le porteur de projet et ne pouvant être atteint que par un plan de communication efficient.
La conquête des souscripteurs passe par la maitrise de la cartographie (taille, nature) de la communauté d’internautes mobilisable autour du projet et par le « capital social » du porteur de projet au sein de cette communauté. En effet, il existe une corrélation entre la réussite d’une campagne et la diversité de l’environnement social du porteur de projet (appartenance à des réseaux sociaux ; maitrise des nouvelles technologies de communication sur Internet ; qualité de communicant…).
A noter, en dépit d’une telle stratégie, le facteur « hasard » (période propice ; concurrence des autres projets…) demeure une contrainte caractéristique du crowdfunding. Et, si environ 50% des campagnes de crowdfunding n’atteignent pas leur cible, cela résulte le plus souvent d’un manque de préparation de la campagne.
Une réglementation récente,
Depuis mai 2013, l’Autorité des marchés financiers et l’Autorité de contrôle prudentiel propose un guide permettant au porteur de projet de connaître la réglementation actuellement en vigueur. Ainsi, l’ordonnance n°2014-559 du 30 mai 2014 relative au financement participatif, introduit de nouveaux articles au code monétaire et financier, dont ceux liés aux statuts d’exercice des métiers du financement participatif : l’intermédiaire en financement participatif (article L. 548-2), pour les plateformes de prêts rémunérés ou non (crowdlending) et le conseiller en investissement participatif (article L. 547-1) pour les plateformes d’investissements (crowd-equity). Ces statuts sont soumis à une immatriculation obligatoire, à compter du 1er octobre 2014, au registre des intermédiaires de l’assurance, de la banque et de la finance. Cette ordonnance, supprimant le monopole bancaire sur les prêts rémunérés, facilitera le financement par prêts de projets dans la limite de 1 000 € par investisseur et de 1 million d’€ par projet.
Un outil de validation et de collaboration,
En 2012, un article paru dans le MIT Technology Review citait le crowdfunding comme l’une des 10 technologies clefs émergentes de l’année. De fait, le crowdfunding découle du crowdsourcing qui mobilise la créativité et les connaissances de plusieurs personnes vers un même objectif. Et, dans une certaine mesure, il peut permettre de mener une étude de validité ou de pertinence de la finalité d’un projet en le soumettant ainsi au jugement d’une communauté. De même, certaines productions communautaires peuvent, de manière originale et collaborative, viser à la création d’un groupe de personnes aux compétences partagées pour co-développer une idée, un concept, une innovation. Les sites IndieGogo, Innovation Exchange, Innocentive ou Crowdspring proposent une telle approche.
En savoir plus
Consultez le Baromètre 2013 du crowdfunding sur le site de Financement Participatif France (FPF)
Consultez les annuaires des plateformes de financement participatif : TousNosProjets.fr de bpifrance ou Alloprod.
Consultez le Guide du financement participatif à destination du grand public
Consultez le Guide du financement participatif à destination des plateformes et des porteurs de projet
Téléchargez le Guide du CrowdFunding
A lire : BURGER-HELMCHEN Thierry, PENIN Julien, « Crowdsourcing : définition, enjeux, typologie ». Management & Avenir, n°41, p.254-269, 2011.
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