Le biocontrôle, une dynamique de réseaux
Aujourd’hui, le biocontrôle est au cœur de la démarche de réduction des intrants phytosanitaires conventionnels. Promouvoir et développer cette dynamique sont deux des axes prioritaires du plan Ecophyto 2.
Dans cette optique, producteurs et acteurs de la recherche et du développement, qu’ils soient industriels, techniques ou académiques, se mobilisent et s’organisent. Le travail en réseau sur le biocontrôle permet ainsi de capitaliser sur des expériences transversales et transfilières, de mutualiser les efforts de recherche, pour en accélérer le développement.
Ce billet a pour vocation de présenter de manière non exhaustive les principaux réseaux d’expérimentation, de recherche et professionnels dédiés en partie ou exclusivement au biocontrôle.
Renforcer les liens entre recherche, expérimentation et production pour favoriser la protection intégrée des cultures
Le Réseau DEPHY (Démonstration, Expérimentation et Production de références sur les systèmes économes en phytosanitaires) constitue une action majeure du plan Écophyto. Ce réseau a vocation à développer, mutualiser et diffuser les expériences réussies de systèmes de culture réduisant fortement l’usage des produits phytosanitaires. Les informations de ce réseau sont notamment relayées sur le Portail EcophytoPIC qui a pour objet de sensibiliser les professionnels du secteur agricole au sujet de la Protection Intégrée des Cultures (PIC) et ainsi de faire évoluer les pratiques vers une réduction de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques.
Depuis 2007, plusieurs Groupements d’Intérêt Scientifique (GIS) nationaux visant le développement de systèmes de production à haute performance économique, environnementale et sociale ont été mis en place. Ces groupements permettent de renforcer les liens entre les différents acteurs de la recherche et du développement (chercheurs, expérimentateurs, conseillers agricoles).
Le GIS PIClég notamment est dédié à la production intégrée en cultures légumières. Né il y a dix ans sous le parrainage du Ministère de l’agriculture, à l’initiative des Producteurs de Légumes de France, de l’INRA et du Ctifl, il a pour ambition de mobiliser l’ensemble des acteurs de la recherche et du développement pour proposer aux producteurs de légumes des systèmes de cultures respectueux de l’environnement et économiquement performants. Il a notamment permis l’élaboration d’un guide pratique de conception de systèmes de culture légumiers économes en intrants, incluant l’utilisation du biocontrôle.
Un GIS Grande Culture à Hautes Performances Economiques et Environnementales (GC HP2E) et un GIS Fruits ont également été mis en place respectivement en 2009 et 2012.
Le Ctifl a publié en novembre dernier un hors-série Infos-Ctifl « Dossier biocontrôle en fruits et légumes » en co-organisation avec le GIS PIClég et le GIS Fruits. On y retrouve un état des lieux du biocontrôle, les recherches en cours et les perspectives, ainsi qu’un ensemble de références bibliographiques utiles.
Les questions de recherche qui se posent aux filières agricoles sont rarement circonscrites à un périmètre national. La résolution efficiente des problématiques passe donc par leur capacité à s’interconnecter à une échelle internationale. Ainsi, dans l’objectif d’améliorer la collaboration des acteurs de la recherche de la filière fruit au niveau européen, le Réseau EUFRIN a vu le jour en 1993. Son bon fonctionnement a incité récemment la filière légumière à organiser également un tel réseau, baptisé EUVRIN (Lire notre billet sur le sujet). Au sein de ce réseau un des groupes de travail est dédié à la protection intégrée des cultures.
Concernant les grandes cultures, un réseau collaboratif national baptisé R2E (Réseau d’expérimentation d’excellence) a été mis en place par ARVALIS – Institut du Végétal. Il regroupe les organismes collecteurs, coopératives, négoces afin que chacun prenne part à l’évaluation et au développement du biocontrôle.
Favoriser les avancées scientifiques et techniques sur le biocontrôle
Des réseaux scientifiques dédiés au biocontrôle ont été mis en place ces dernières années.
Ainsi, en 2014 le réseau EMBA (Ecological Management of Bioagressors in Agroecosystems) a été créé par le département Santé des Plantes et Environnement (SPE) de l’INRA. Il regroupe environ 90 chercheurs s’intéressant à la gestion écologique des bioagresseurs dans les agroécosystèmes. Il a pour objectif de structurer la recherche, d’identifier les projets scientifiques à développer et de promouvoir des collaborations avec les partenaires publics et privés. Les membres scientifiques de ce réseau abordent différentes facettes de la protection durable des plantes cultivées vis-à-vis des ravageurs et des maladies, qu’il s’agisse de l’utilisation d’agents de biocontrôle ou de lutte biologique classique ou par conservation.
L’INRA est aussi à l’initiative du Consortium Biocontrôle. Créé en 2016, ce dernier réunit 37 acteurs des secteurs publics et privés avec comme objectif commun de participer à l’essor du biocontrôle par la recherche, le développement et l’innovation. Le Consortium aura pour finalités le développement de nouveaux produits et agents de biocontrôle, l’amélioration de l’efficacité et l’intégration de ces produits et agents dans les systèmes de culture. Les concertations entre acteurs publics et privés ont permis la mise en place de réseaux d’expérimentation dédiés au biocontrôle. Un projet XP-BC a ainsi été déposé et est financé par le plan Ecophyto 2 : ce projet vise à déployer trois réseaux expérimentaux, multi-cultures et multi-régions, pour accompagner l’industrie dans ses développements de produits mais aussi développer un savoir-faire d’intégration et d’utilisation des produits dans les systèmes de culture.
Ils existent également des réseaux thématiques abordant des problématiques ciblées du biocontrôle.
Le RMT Elicitra, co-animé par ARVALIS-Institut du végétal, Vegenov et l’INRA vise à comprendre, développer et promouvoir les stratégies basées sur le traitement des plantes avec des éliciteurs. Il rassemble les principales filières de productions végétales. En décloisonnant les travaux menés par les différents organismes de recherche, le RMT permet d’accélérer le développement de cette approche alternative en protection des plantes multi-filière. Un bilan à mi-parcours a récemment été rédigé et les résultats d’essais des membres du RMT sont maintenant disponibles sur la base de données API-AGRO.
Au-delà de la recherche, les professionnels du biocontrôle s’organisent
Les entreprises françaises développant des solutions de biocontrôle se sont regroupées au sein d’une association : IBMA France. Cette association a pour objectif de communiquer, expliquer et faciliter la diffusion des produits de biocontrôle. Elle organise prochainement un colloque IBMA Biocontrôle « Une nouvelle culture » – mardi 31 janvier 2017.
Côté producteurs, les groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) ont été mis en place dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Ces collectifs d’agriculteurs reconnus par l’État s’engagent dans un projet pluriannuel de modification ou de consolidation de leurs pratiques en visant à la fois des objectifs économiques, environnementaux et sociaux. Certains ont pour thématique des sujets en rapport avec la Protection Intégrée.
Des réseaux de dissémination et partage d’informations
Différentes associations ont été créées pour informer et former au biocontrôle.
Ainsi, l’Académie biocontrôle et de la Protection Biologique Intégrée a pour vocation de fédérer l’ensemble des expertises du biocontrôle, afin d’être une source d’informations sur le biocontrôle pour l’enseignement et autres actions de communication visant à promouvoir le biocontrôle et déployer sa pratique.
L’AFPP a pour mission de favoriser les contacts pluridisciplinaires, les échanges et la communication dans le domaine de la protection des plantes et de leur environnement. Ils organisent notamment en mars 2017 une conférence sur les moyens alternatifs de protection des plantes. Cette conférence fait une part belle aux méthodes de biocontrôle.
Plus spécifique, l’association PO2N s’intéresse aux pesticides organiques d’origine naturelle et aux médiateurs chimiques impliqués dans les interactions biotiques en protection des cultures. Le but est avant tout un partage des connaissances. Tous les deux ans, l’association organise d’ailleurs un colloque dédié au biocontrôle.
Le biocontrôle est aujourd’hui en plein essor et de nombreux réseaux ont été créés pour structurer et faire avancer cette dynamique. C’est aujourd’hui en marche, même s’il est parfois difficile de faire travailler ensemble des structures techniques, académiques et/ou privés des différentes filières, dont les fonctionnements et les objectifs différent.
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