Colloque Elicitra : les stimulateurs des défenses des plantes, des produits prometteurs avec des limites à lever
Le colloque Elicitra a permis de réunir les différents acteurs du développement des stimulateurs des défenses des plantes. Les présentations et discussions montrent que les SDP présentent un potentiel intéressant, s’inscrivant dans les objectifs d’Ecophyto 2018, mais que des travaux de recherche restent à mener pour faire face aux limites techniques du transfert vers le terrain.
Le colloque Elicitra, co-organisé par Arvalis Institut du Végétal, et Vegenov, financé par le Ministère de l’agriculture, avait pour principal objectif d’échanger sur les dernières avancées dans le domaine des stimulateurs des défenses des plantes (SDP). Ce colloque a abordé à la fois les aspects règlementaires, techniques et scientifiques, au travers de présentations et de tables rondes d’experts.
Introduction du colloque
Brigitte Kovacs, de la DGER (Direction générale de l’enseignement et de la recherche) a introduit le colloque par une présentation de ce qu’est un RMT (Réseau Mixte Technologique), en se focalisant sur le RMT Elicitra et en donnant sa vision de ce réseau.
Le colloque a également été introduit par Philippe Nicot, de l’INRA d’Avignon, organisateur du colloque international OILB (Résistance induite chez les plantes contre les insectes et maladies : du succès au laboratoire à la réussite au champ) jumelé avec le colloque Elicitra. Le lien entre les deux colloques est ressorti de cette introduction comme un point fort permettant de valoriser les découvertes scientifiques présentées au colloque OILB dans le cadre des questionnements pratiques évoqués lors du colloque Elicitra.
Les objectifs du RMT Elicitra ont été présentés par Sonia Hallier et Régis Berthelot, les deux animateurs du réseau. L’objectif de ce réseau est de comprendre, développer et promouvoir, au sein des filières, les stratégies de stimulation des défenses des plantes.
Bilan scientifique
Sur l’aspect scientifique, les présentations ont porté sur les particularités des SDP. Xavier Daire, de l’INRA de Dijon, et Philippe Reignault, de l’ESA de Lille, ont ainsi présenté l’état de l’art sur les SDP, et notamment sur leur mode d’action. La question de la définition des SDP a été posée. Les produits capables de stimuler certaines voies de défense des plantes mais présentant un effet direct sur le pathogène, à la dose efficace, pourraient ne pas être considérés comme des SDP.
La présentation de Marie Torres, du CTIFL, et de Brigitte Maisonneuve, de l’INRA d’Avignon, sur le projet collaboratif DEFILeg, montre par ailleurs l’effet du choix variétal et des stress abiotiques sur l’efficacité de plusieurs SDP face au mildiou de la laitue et à l’oïdium du melon. Certains stress semblent ainsi avoir dans certains cas un effet négatif sur l’efficacité des SDP. D’autres paramètres agronomiques comme le stade de la plante et la pression de maladie semblent également avoir un impact sur l’effet des SDP.
Bilan technique
Sur l’aspect technique, les présentations de Marie-France Corrio-Costet, de l’INRA de Bordeaux, et Marie-Noëlle Brisset, de l’INRA d’Angers, ont mis en avant de nouvelles techniques, notamment moléculaires, pour évaluer la capacité des produits à stimuler les défenses des plantes. Ces présentations ont montré qu’il était désormais possible de caractériser de façon fiable et rapide des produits potentiellement SDP.
Une présentation générale du guide méthodologique d’évaluation des SDP créé par le RMT Elicitra a également été faite par Sonia Hallier, de Vegenov et Nicolas Aveline, de l’IFV. Ce guide devrait être disponible cet automne.
Le transfert vers le terrain
Plusieurs présentations ont porté sur le transfert vers le terrain de l’utilisation de SDP qui avaient montré une efficacité lors de tests en laboratoire. Les difficultés terrain observées dans le cas de la septoriose du blé et dans le cas du mildiou de la vigne ont été décrites dans les présentations d’Ali Siah, de l’ISA de Lille et Claude Maumené, d’Arvalis pour le blé et de Fabienne Bailleul, de l’université de Reims, et Nicolas Aveline, de l’IFV, pour la vigne.
A l’inverse, plusieurs cas de réussites de SDP sur le terrain ont été présentés, notamment sur mildiou du chou-fleur par Damien Penguilly, de la station du CATE, et rouille blanche du chrysanthème par Oscar Stappel, de la station STEPP Bretagne. Dans les deux cas, un produit a pu être homologué, avec des résultats d’efficacité égaux, voire supérieurs aux produits conventionnels. Ces deux « success stories » sur des produits utilisés en serre par les producteurs, montrent que le premier pas des SDP vers le marché sera probablement vers les plantes cultivées en conditions semi-contrôlées (serres ou tunnels) à l’instar des plantes cultivées en plein champ.
Des résultats positifs ont également été présentés par plusieurs firmes sur leurs molécules SDP: l’isotianil par Marie-Pascale Latorse, de Bayer, la laminarine par Jean-Marie Joubert, de Goëmar et l’ASM pour Laure de Bastard, de Syngenta.
Bilan réglementaire
Sur l’aspect règlementaire, deux représentants des instances administratives, Eric Liégeois de la commission européenne, DG entreprise, et Laurent Thibault, de l’ANSES, ont rappelé les différences entre produits « fertilisants » et produits « phytosanitaires ».
Le message fort du discours de Laurent Thibault est que le choix du domaine d’homologation dépend des allégations qui sont faites sur le produit lors de sa commercialisation, sachant qu’un produit peut s’inscrire dans les deux domaines.
Conclusion du colloque
En conclusion, Philippe Gate, directeur scientifique d’Arvalis, a insisté sur la nécessité de poursuivre les efforts de recherche, en mettant en commun les expertises de tous les acteurs, selon une approche transversale. Son regard sur l’avenir des SDP était plutôt optimiste.
Les présentations sont disponibles en ligne sur le site elicitra.org.
Ce colloque a obtenu un taux de satisfaction de 98%.
Crédits Photos : Pulvérisation au laboratoire : © P. Réguer – Plaque de PCR : © luchshen – Fotolia.com – Traitement au champ : © Kara – Fotolia.com