La stérilité mâle chez les plantes cultivées

Chez les plantes cultivées, la stérilité mâle représente un mécanisme important pour faciliter la production de semences hybrides, permettant ainsi aux sélectionneurs d’exploiter les gains de rendements associés à la vigueur hybride. La stérilité mâle peut être soit de type génique (on parle de GMS), soit cytoplasmique (on parle alors de CMS). Cependant, ces systèmes de stérilité ne sont pas figés dans le temps et il est possible de restaurer la fertilité chez ces plantes.

CMS et GMS

Le mécanisme de stérilité mâle, au sens large, a été observé chez plus de 600 espèces végétales. Elle conduit à l’impossibilité pour la plante de produire des anthères déhiscents, du pollen fonctionnel et des gamètes mâles viables, lui évitant ainsi un trop fort taux de consanguinité. Il s’agit d’un phénomène naturellement présent chez un grand nombre d’espèces végétales.

La stérilité mâle chez les plantes inclut deux systèmes différents :

  • La stérilité mâle cytoplasmique (CMS) qui est provoquée par une interaction entre des gènes nucléaires et des gènes mitochondriaux. Si cette interaction entre gènes nucléaires et mitochondriaux est interrompue, la plante redevient alors fertile.
  • La stérilité mâle génique (GMS) qui est causée par des gènes nucléaires uniquement. Dans certains cas, la GMS peut être réversible en fonction des conditions environnementales (température, durée du jour,…), on parle alors d’EGMS (pour stérilité mâle génique environnement-dépendante).

Les mécanismes génétiques et moléculaires sous-jacents de la stérilité mâle et de la restauration de la fertilité chez les plantes représentent un sujet d’étude important pour la communauté scientifique.

Comment obtenir des plantes portant une CMS ?

La stérilité mâle cytoplasmique peut :

  • soit exister naturellement chez une espèce végétale. C’est le cas de l’oignon, de la carotte ou du radis par exemple ;
  • soit être transférée à une espèce cultivée par croisement naturel avec une espèce proche chez laquelle la stérilité mâle existe naturellement ;
  • soit être induite au laboratoire chez une espèce cultivée, à partir d’une stérilité mâle provenant d’une espèce de la même famille avec laquelle l’espèce cultivée ne se croise pas de façon naturelle. Cela se fait en utilisant une biotechnologie : la fusion de protoplastes.

Les protoplastes (des cellules végétales dont la paroi pectocellulosique a été enlevée par digestion enzymatique) possèdent la capacité de fusionner entre eux lorsqu’ils sont placés dans un milieu approprié. Cette technique permet de surmonter les barrières liées à la reproduction sexuée et de créer de nouvelles combinaisons entre

le noyau et le cytoplasme.

Cette biotechnologie a été utilisée pour introduire la stérilité mâle chez l’endive (à partir d’une CMS du tournesol) ou encore chez les choux et le colza (la CMS provenant du radis).

A l’inverse, la fusion de protoplastes peut également être utilisée pour restaurer la fertilité chez des plantes mâle-stériles.

Quel est l’intérêt de la stérilité mâle en sélection ?

La stérilité mâle est également un outil précieux pour les sélectionneurs, qui leur permet d’exploiter la vigueur hybride (ou hétérosis), ce qui représente un enjeu économique important. Par exemple, plus de la moitié de la production des espèces de grandes cultures (maïs, riz, sorgho, colza, tournesol) provient de variétés hybrides.

Les lignées femelles CMS ou GMS utilisées par les sélectionneurs dans leurs plans de croisements pour l’obtention de variétés hybrides leur évitent d’avoir recours à des castrations manuelles, mécanisées ou chimiques, qui sont coûteuses, parfois inefficaces, voire polluantes pour l’environnement (Figure 2).

 

cms


Figure 2 : La stérilité mâle cytoplasmique : produire des hybrides sans castration (exemple du tournesol) – Source : http://www.gnis-pedagogie.org

 

Pour en savoir plus sur la stérilité mâle chez les plantes :

  • Chen and Liu (2014). Male sterility and fertility restoration in crops. Annual Review of Plant Biology, vol. 6, pp. 579-606.

 

Crédits Photos : choux fleur : © auryndrikson – Fotolia.com ; Sunflower © Ian 2010 – Fotolia.com ; Small garden radish with leaves © Natika – Fotolia.com ; Carrot vegetable with leaves © Natika – Fotolia.com ; Onions on a white background © dibas99 – Fotolia.com
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Ce billet a été rédigé par Céline Hamon
Responsable R&D Biologie Moléculaire Céline, armée de pipettes, de marqueurs et d’une équipe de choc, traque l’ADN des plantes pour en déchiffrer toutes leurs caractéristiques !