Culture in vitro, retour aux bases

La culture in vitro est une technique importante en production végétale, notamment pour les espèces à multiplication végétative. Elle permet la production en quantité de jeunes plants et garantit la circulation de matériel végétal sain. Quel est son principe ? Comment faire ? Revenons sur les bases de cette technique !


Qu’est-ce que la culture in vitro ?

Son principe repose sur la totipotence cellulaire végétale, une caractéristique propre aux végétaux. Certaines cellules végétales différenciées peuvent revenir à un stade indifférencié. Elles ont alors les mêmes qualités que les cellules embryonnaires et peuvent régénérer dans les conditions adéquates, une nouvelle plante identique à la plante mère.

La technique de culture in vitro consiste donc à placer en conditions artificielles et contrôlées des organes de plantes, parfois très petits, afin de reproduire plus vite ou en plus grande quantité des plantes entières.

L’utilisation de la culture in vitro de végétaux, aussi appelée micropropagation ou microbouturage, s’est généralisée à la fin des années 1960.


Les trois phases de la culture in vitro

On considère classiquement que pour du microbouturage, la culture se déroule en trois phases.

Introduction in vitro de matériel sain

La première phase est l’introduction in vitro de matériel sain, c’est-à-dire indemne de bactérie ou champignon de surface. La quantité de sucre apportée à la plante dans le milieu de culture in vitro pour se développer est suffisante pour permettre également aux champignons et bactéries de se multiplier, et ce, encore plus rapidement que le végétal ! Il est donc nécessaire de désinfecter tout le matériel utilisé pour ne pas les introduire dans la culture, y compris les fragments de plantes, et de travailler en conditions stériles.

Prélèvement de matériel végétal sous hottes stériles

Ce matériel de départ peut provenir de parties très variées de la plante et subit une désinfection avec une solution de chlore actif (eau de javel ou hypochlorite de calcium) et un rinçage soigneux à l’eau stérile.

Pour du microbouturage, on part en général d’un apex ou d’un nœud prélevé sur la tige, voire d’un méristème. Parfois il est possible d’induire des pousses feuillées à partir de pièces florales (alliums, choux, chrysanthèmes…) ou de fragments de feuilles (saintpaulia, bégonia, tabac …). La vitesse de redémarrage de l’explant dépend souvent de sa taille au départ, et de l’espèce végétale.

Ensuite, les explants sont placés en salle de culture contrôlée, avec une température et une durée du jour stables (par exemple : 20-22°C, 16h de jour).

Pousses feuillées de tabac régénérées à partir de disques foliaires

Micropropagation

La deuxième phase est celle de multiplication, ou micropropagation, par ramification le long de la tige ou bourgeonnement à la base du plant. Cette étape est en général stimulée par un apport de cytokinines (hormone de croissance produite naturellement par les végétaux) dans le milieu de culture.

Le nombre de cycles de multiplication dépend du taux de multiplication à chaque subculture et de l’objectif de production.

Une subculture in vitro dure de 2 à 6 semaines, ce qui permet de réaliser des cycles de multiplication rapides.

Préparation à l’acclimatation

La troisième étape est celle de préparation à l’acclimatation. En général, on cherche à produire des pousses feuillées portant un apex et des racines, stimulées par les auxines du milieu. Ces racines ne sont pas fonctionnelles une fois la plante placée dans du terreau d’acclimatation, mais elles contribuent à une bonne reprise et à la néoformation de racines sur le jeune plant une fois celui-ci en terre.


La sortie de culture in vitro ou acclimatation

Une fois enracinés, les plants peuvent être acclimatés en serre. Cela consiste à les sortir d’in vitro, les placer dans du terreau horticole et les adapter progressivement aux conditions de culture normales, plus sèches et avec une intensité lumineuse plus importante qu’en laboratoire.

La phase d’acclimatation des jeunes plants prend quelques jours à quelques semaines.

Plantules de lavande in vitro à différents stades

Le milieu de culture in vitro

Un des éléments majeurs des conditions contrôlées de culture in vitro est l’apport des éléments nutritifs sous forme d’un substrat synthétique de composition précise. Ce substrat s’appelle « milieu de culture ». Il comporte, outre de l’eau et des éléments minéraux nécessaires à toute plante, un gélifiant (permettant de donner une texture ferme au milieu), du sucre, des vitamines et des hormones végétales.

Ces composants permettent la croissance du tissu isolé en organe, même s’il n’est pas relié à la plante mère habituellement source d’éléments nutritifs.

Le sucre apporte aux fragments de plante, parfois réduits à juste quelques cellules isolées, l’énergie nécessaire pour se multiplier et donner une nouvelle plante en conditions d’hétérotrophie. L’hétérotrophie est la nécessité pour un organisme vivant de se nourrir de constituants organiques préexistants.

Les hormones végétales permettent, elles, d’orienter le développement des tissus vers la prolifération de pousses feuillées ou la croissance de racines. En cours de culture, il faut donc faire varier les hormones végétales en fonction du type de croissance recherché : des cytokinines pour favoriser la multiplication des microboutures, puis des auxines pour favoriser l’enracinement préparatoire à l’acclimatation.

Le milieu de culture in vitro a une composition complexe et adaptée à chaque espèce végétale et à chaque stade de développement de la plante in vitro. D’une espèce à l’autre, les éléments minéraux changent afin de s’adapter aux besoins physiologiques de l’espèce.


Des applications variées

L’environnement de culture des plants in vitro et les compétences des opérateurs impliquent des coûts de production assez élevés. En effet, très peu d’opérations sont automatisées. Mais le jeu en vaut bien la chandelle ! Les outils de culture in vitro de végétaux reposent sur la même technique de base, mais en fonction du matériel végétal de départ, diverses d’applications (décrites dans La culture in vitro au service de la qualité des semences et plants) sont possibles :

  • produire des végétaux de meilleure qualité,
  • faciliter l’exploitation des ressources génétiques,
  • accélérer la création variétale.

Le recours à la culture in vitro permet de produire rapidement un grand nombre de plants, ce qui est intéressant dans le cas d’une innovation que l’on veut rapidement proposer sur le marché. Mais ce sont surtout les avantages offerts en termes de qualité des jeunes plants qui justifient le recours à cette technique coûteuse. La question de l’assainissement sera d’ailleurs le thème de notre prochain billet.


Pour conclure sur la culture in vitro, gardez en tête que si une application peut être très utilisée chez une espèce végétale donnée, d’autres espèces peuvent y être récalcitrantes. Toute la difficulté de la technique consiste à mettre au point la composition optimale du milieu de culture en fonction de l’objectif fixé au départ !




Crédits photos : Monsieur Media - Vegenov
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Ce billet a été rédigé par Manuelle Bodin
C’est avec plus de 15 ans d’expérience dans le développement d’outils de biologie cellulaire pour les sélectionneurs que Manuelle, grâce à son équipe, met en place des solutions techniques adaptées à chaque espèce végétale.