Elle n’a pas fait un bébé toute seule… !
Les angiospermes ou plantes à fleurs, souvent hermaphrodites, ont mis en place des systèmes d’auto-incompatibilité afin de limiter leur autofécondation et favoriser le brassage génétique. En fonction de l’information génétique apportée par le pollen, l’auto incompatibilité peut être sporophytique ou gamétophytique. Ces dispositifs d’auto incompatibilité ont été largement étudiés afin de comprendre les mécanismes moléculaires et morphologiques sous jacents.
L’auto-incompatibilité est l’une des barrières principales à l’autofécondation mise en place chez la plupart des angiospermes (plantes à fleurs), permettant ainsi à l’organe reproducteur femelle, le pistil, de discriminer le pollen « soi » du pollen « non-soi » et de rejeter spécifiquement le pollen « soi ».
Ce système est contrôlé par un seul locus multigénique très polymorphe : le locus S. Ce locus S renferme deux gènes clés génétiquement liés qui déterminent respectivement la spécificité allélique (haplotype S) du pistil ou du pollen. Une réaction d’auto-incompatibilité intervient lorsque le pistil reconnait, puis rejette un grain de pollen du même haplotype S.
Le système d’auto-incompatibilité peut être soit :
- sporophytique (Brassicaceae…) : les cellules de la paroi du grain de pollen contiennent les deux allèles au locus S provenant des cellules nourricières parentales qui ont permis leur formation. Si un des deux allèles est identique à ceux de l’ovaire de l’organe femelle, la germination du pollen sera bloquée et la fécondation ne pourra avoir lieu.
- gamétophytique (Solanaceae, Papaveraceae…) : le pollen contient l’un des allèles parentaux au locus S. Si cet allèle est le même qu’un des deux de l’ovaire de l’organe femelle, le développement du tube pollinique sera bloqué et la fécondation ne pourra avoir lieu.
Chez les Brassicaceae (chou, brocoli, colza,…), le rejet se manifeste très précocement au niveau du stigmate, surface réceptrice du pistil, en bloquant la germination du pollen. La reconnaissance se fait par interaction entre deux protéines, un ligand SCR ou SP11 (sécrété par le pollen) et un récepteur SRK (présent sur le stigmate).
Chez les Papaveraceae (coquelicot,…), le pollen commence par germer. La reconnaissance se fait ensuite entre une protéine transmembranaire du pollen, la Prps, et une protéine sécrétée sur le pistil, la PrSS. Un afflux de calcium dans le tube pollinique va inhiber sa croissance et aboutir à la mort du pollen incompatible.
Chez les Solanaceae (tomate, poivron,…), le déterminant femelle du locus S est une S-RNase et le déterminant mâle, une protéine F-Box (SLF ou SFB selon les espèces). Dans ce cas, le pollen germe et les S-RNase sont libérées au niveau du tube pollinique entrainant sa dégradation et le rejet du pollen du même haplotype S.
D’autres protéines et mécanismes interviennent, en plus des déterminants mâle et femelle, pour accroitre la réaction d’auto-incompatibilité. Du fait de la grande variabilité génétique du locus S, les réponses d’auto-incompatibilité sont différentes jusqu’à l’existence des haplotypes S auto-compatibles permettant l’autofécondation.
L’auto-incompatibilité peut-être un frein aux sélectionneurs car elle limite les possibilités d’hybridation. Il est donc important de pouvoir caractériser les allèles au locus-S des génotypes parentaux à croiser. Des marqueurs moléculaires sont déjà disponibles chez de nombreuses espèces.
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