L’identification moléculaire des micro-organismes au service des filières végétales

Identification moléculaire de micro-organismes des plantes

Chaque année, Vegenov réalise des travaux pour répondre aux besoins des filières de production végétale. Parmi ces travaux, il y a notamment l’étude des maladies les plus impactantes et émergentes pour les producteurs, afin de mieux les comprendre et ainsi développer des solutions permettant de limiter leur impact. Dans cet objectif, il est essentiel de connaitre l’identité des agents responsables des symptômes, ce qui implique de les analyser au laboratoire par différentes méthodes telles que la microscopie ou la biologie moléculaire.

Cas concret d’une nouvelle maladie identifiée sur Allium

Parmi les cultures étudiées à Vegenov, il y a notamment les alliums (en particulier les échalotes et oignons), pour lesquels des symptômes sur tige type « taches blanches », sont régulièrement observés en cours de culture depuis plusieurs années, faisant penser à du Botrytis squamosa. Il était nécessaire de confirmer l’agent responsable des symptômes pour envisager des solutions de lutte appropriées. Différentes structures de la filière (la Chambre d’Agriculture de Bretagne CRAB, le CATE, Vegenov et OBS Innovation) ont travaillé conjointement sur la problématique.

Des observations microscopiques non concluantes

Des échantillons symptomatiques ont été récoltés par le CATE et la CRAB (Figure 1). Des observations au microscope de ces symptômes ont été réalisées à OBS Innovation et à Vegenov et n’ont pas permis de mettre en évidence la présence de B. squamosa. Seuls des spores de Stemphylium et plus minoritairement d’Alternaria ont été observées. Stemphylium n’a pas été considéré comme pouvant être responsable des symptômes car il est connu comme étant un champignon saprophyte se développant principalement sur les tissus morts ou mourants des alliums. Concernant Alternaria, les symptômes observés n’étaient pas caractéristiques de cet agent.

Figure 1 : Tiges d’échalote prélevées au champ avec symptômes de type « taches blanches »

Figure 2 : Spores de Stemphylium et d’Alternaria observés à partir de symptômes type « taches blanches »

Des premières analyses moléculaires ciblées par qPCR et culture sur boite de Pétri

En parallèle de ces observations, des analyses moléculaires par qPCR avec des marqueurs spécifiques de B. squamosa ont été réalisées sur plusieurs échantillons de tiges avec « taches blanches », mais l’agent pathogène n’a pas été détecté. Une étape de mise en culture sur boîte de Petri a alors été réalisée, toujours à partir de ces mêmes tiges à « taches blanches », avec isolement d’un champignon. Ce champignon était difficile à identifier par observations macro et microscopique, en raison de l’absence de spores. Il a alors été inoculé sur plants d’échalote sains, afin de tenter de reproduire des symptômes. Un fort développement mycélien a été obtenu sur plants, mais aucune spore n’a été observée, ce qui a, à nouveau, empêché l’identification de l’agent microbien.

Figure 3 : Plants d’échalotes inoculés par le mycélium du champignon isolé sur boite de Petri. Un important développement mycélien a été observé.

Identification du pathogène (Stemphylium vesicarium) grâce au barcoding

Une analyse moléculaire par séquençage de gènes (également appelée barcoding) a été réalisée vis-à-vis de 2 gènes d’intérêt taxonomique (ITS et RPB2) sur la souche isolée sur boite de Petri, mais aussi sur des prélèvements de mycélium des plants inoculés à Vegenov. Une identification à 100% de Stemphylium vesicarium a été obtenue. Ce microorganisme considéré comme secondaire, pourrait donc être responsable de dégâts sur feuilles saines importants dans la filière légumière, possiblement favorisé par des insectes comme les thrips et/ou certaines conditions climatiques comme un temps chaud (18-25°C) associé à une période d’humectation des feuilles de plus de 16h. Début 2024, Vegenov prévoit de développer des marqueurs qPCR spécifiques de S. vesicarium, afin d’identifier rapidement le champignon lors de la prochaine campagne de culture et d’évaluer son importance en termes de dégâts dans la filière légumière.

Des analyses moléculaires pour toute filière végétale

Outre ces pathogènes des alliums, Vegenov dispose de plus d’une quarantaine de marqueurs pour la détection par qPCR de microorganismes associés aux plantes (qu’ils soient pathogènes ou bénéfiques). De nouveaux marqueurs sont continuellement développés, pour répondre aux demandes des professionnels, de nos partenaires ou dans le cadre de projets collaboratifs. Ces méthodes moléculaires permettent aux différents acteurs ayant des besoins analytiques, de réaliser rapidement et de façon spécifique des analyses d’identification et de quantification des micro-organismes présents dans des échantillons variés (eau d’irrigation, air, sol, racines, feuilles ou graines). En complément, les approches globales non ciblées par barcoding permettent d’étudier et de suivre des micro-organismes sans a priori.

Avec le financement de :

La responsabilité du Ministère en charge de l’agriculture ne saurait être engagée.

Liens vers d’autres billets ou sites internet :

http://www.vegenov.com/

https://www.station-cate.fr/bulletins/ (Aujourd’hui et Demain n°158, page 24 ; Aujourd’hui et Demain n°157, page 6)

Site internet IRIIS phytoprotection (page brûlure stemphylienne, consultée le 07/03/2024)

Crédits photos :

  • Image à la une : Science research set vector illustration. Cartoon tiny people study DNA with magnifying glass and microscope, grow plant with leaves from helix with robot arm, work with chemical laboratory equipment – Par Flash concept – © Adobe Stock
  • Autres photos : © Vegenov-BBV

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Ce billet a été rédigé par Klervi Crenn
Chargée de Projets en Qualité et Santé des Plantes, Klervi est une microbiologiste qui s’appuie sur des outils de biologie moléculaire pour étudier la microflore des plantes (qu’elle soit bénéfique ou pathogène), mais aussi pour étudier le mode d’action de produits de protection et nutrition des plantes.